Petit compte rendu de ma première course "Funcup" de ce week-end.
Résumé des épisodes précédents:
Après un premier essai en Funcup à Spa en 2011, lors d'une journée circuit, R-Ickx-7 m'avait proposé de faire un essai de course dans son Team, sur une Funcup biplace qui sert à la compétition autant qu'a "l'écolage".
En Mars, j'ai donc passé ma licence RACB, nécessaire pour accéder aux épreuves nationales et internationales.
L'organisation Funcup Belge ayant eu quelques soucis financiers, R-Ickx-7 a réussi à nous obtenir un slot dans le Championat Français, lors de la manche de Dijon-Prenois du week-end du 14 avril 2012.
Cerise sur le gâteau, les pilotes habituels de la biplace (dont R-Ickx-7) allaient courrir sur une monoplace plus performante, à laquelle il manquait 2 pilotes, ce qui laissait la biplace totalement libre pour un équipage 100% débutant.
On prend donc les dispositions, bien que la semaine ait assez mal commencé : Très grosse grippe pour moi avec incertitude jusqu'au dernier moment.
Pas très solide sur mes jambes, mais ne voulant rater l'occasion pour rien au monde, j'ai mis le cap sur le repaire secret dans lequel habite R-Ickx-7.
On y retrouve Julien, un autre "Rookie" du week-end et on part tous pour Dijon.
Samedi matin : Premier contact avec les essais libres.
Dijon-prenois est un circuit assez technique, qui correspond bien à l'environnement idéal pour une Funcup (mal à l'aise dans les lignes droites interminables d'un Spa). Il est très valonné et nombre de ses virages sont en dévers ou sans visibilité. De plus, Météo-France nous annonce un week-end assez arrosé.
On prépare les voitures, et R-Ickx-7 par faire un tour d'essai avec la biplace (numéro 342) et revient en nous indiquant que la voiture est "vivante" et que le circuit est glissant par endroit.
Les 2 premiers essais libres des autres "Rookies" (Julien et Vcoil) confirme le côté très physique du pilotage.
C'est donc à mon tour de prendre le volant en essai libre.
On me contorsionne péniblement dans l'habitacle étriqué de la funcup (pas facile quand on fait 1m86 et 100kgs, et qu'on doit partager le même siège qu'un gars qui fait 1m70 et 55kgs) et on démarre.
Voiture de course oblige, c'est du pilotage "unplugged". Pas de direction assistée, d'abs ou d'antipatinage. Le moteur est à 10cm de son dos et on se retrouve au centre d'une caisse de raisonnance qui mélange alu et polyester.
Démarreur, première, on me fait signe de sortir des stands et je me lance sur la pitlane. Une fois passée la ligne blanche, j'accélère à fond, passe la 4eme, freine un peu pour entrer dans le 1er gauche et Eeeeeeehhhhhh, ca glisse à mort. La voiture chasse brutalement de l'arrière, j'arrive à contrebraquer mais c'est l'avant qui part ensuite. Les autres virages confirmeront la tendance : la voiture est très instable et demande une attention de chaque instant pour contrôler ses incessantes ruades. De plus, il faut en permanence contrôler les (minuscules) rétros pour surveiller les furieux qui arrivent sur vous à pleine pompe, tout en composant avec le HANS, ce système qui lie le casque du pilote au baquet, et qui vous empâche presque complètement de tourner la tête. Dans ces conditions, c'est un peu comme traverser l'autoroute avec la tête dans une boîte aux lettres...
A poisse (une longue parabolique à droite qui débouche sur la ligne de départ), je prends le sillage d'un autre concurrent qui parait aussi lent que moi. A 1/3 du virage, sa voiture part en toupie à 10m devant moi. J'essaye de ne pas lever, mais la zone sur laquelle je passe est du véritable verglas. La Funcup chasse de l'arrière, je contrebraque mais le train arrière continue à partir jusqu à un angle d'au moins 30° (je voyais la piste par la fenètre latérale). J'allais commencer à penser que je la récupèrerais pas, quand l'arière à raccroché brutalement, et parti en raquette dans l'autre sens (le tout à 120km/h) avant de se stabiliser miraculeusement au moment de passer sur le vibreur extérieur.
J'entame un 2e tour chrono péniblement, pas du tout en confiance, assez lentement, puis on sort le drapeau rouge. Un premier des (nombreux) crashes qui émailleront le week-end.
Retour penaud au stand, et débriefing avec les 2 autres rookies, qui ont eu la même expérience. Et je n'ai pu faire qu'un seul tour complet en signant un misérable 1:58, soit 18 (Dix-huit!) secondes au tour de plus que le plus rapide. Décontenancé et refroidis par cette première courte expérience, je commence à me dire que je pilote vraiment comme une grosse m*rde (et en plus, ma grippe se calme pas), mais les autres pilotes viendront nous soutenir. Il semblerait que tout le monde soit passé par là, et que Dijon serait le "pire" circuit pour débuter, mais également celui qui fait progresser le plus vite.
Pas rassuré quand même.
On lève le drapeau rouge, mais je n'aurai plus le temps de rouler avant la fin des essais libres.
Après le briefing pilote et le lunch, c'est le début des essais chronos.
Entre temps, il s'est mis à tomber une pluie glaciale.
Le feedback des autres pilotes ne fait qu'augmenter notre stress : Le circuit est devenu une véritable patinoire...
Plusieurs pilotes expérimentés sont d'ailleurs parti en tête à queue de manière brutale à des endroit à priori "faciles".
Bon, ben, faut retourner au charbon...
Sortie de la pitlane en 2eme, passage de ligne blanche, plein gaz et... coupure moteur à l'entrée de la première courbe à droite.
Profitant de l'élan, je me jette sur l'acottement, et j'essaye de redémarrer. Le moteur tousse, mais ne veut rien entendre.
Etant dans une zone à risque et ne voyant pas de commissaires, j'enlève mon harnais et me roule en dehors de la voiture.
Un gars arrive en courant et me crie "Mais pourquoi tu t'es arrêté là!!!", "Bin, mon moteur a coupé". Il lève les yeux au ciel et soupire.
Il a appelé une dépanneuse, a fait demi tour et est reparti.
Un pick-up est venu, a attaché la Fun et est rentré aux Stands (en roulant comme un fou sur une piste défoncée en me tractant avec un ruban de 2 mètres)
2 Essais, 2 échecs. C'est la fête.
On ouvre la funcup. La discussion s'engage pour savoir si il faut plutôt changer l'allumage ou la pompe à essence. Les mécanos finissent par changer la pompe à essence.
Entre temps, je commence réellement à avoir la frousse (en plus de la grippe, je suis trempé et il fait super froid), et commence a échafauder des plans pour filer mes relais à d'autres pilotes sans passer pour un dégonflé.
La funcup redémarre après son changement de pompe.
On repart pour un 3eme essai d'1/4h, qui j'espère sera le bon.
Départ prudent, mais c'est toujours aussi glissant. Le moindre mouvement de volant, ou pression sur les freins ou l'accélérateur envoie la Funcup valdinguer sur toute la longueur de la piste. Mais ici, plus d'interruption, malgré de très nombreux drapeaux jaunes.
On essaye de s'appliquer, on tente de prendre des trajectoires "originales" en évitant les trajectoires du "sec" pour éviter les dépots de gomme.
Quelques tours pour s'acclimater, et se rassurer un peu, et les essais chronos sont terminés.
On pointe 48eme sur 55, sachant qu'on compte le temps le plus rapide de la voiture et qu'un pilote plus expérimenté roule avec nous (4eme pilote).
Je suis sans doute encore plus loin.
Retour à l'hôtel assez déçu. Douche, repas puis dodo pour être en forme.
Dimanche : Jour de course.
Lever à 6h30, déjeuner à 7h en combi et arrivée au circuit à 7h45.
Les conditions se sont encore dégradées car il a plu toute la nuit
La direction décide de faire un départ lancé sous safety car, vu l'état de la piste.
C'est Vincent, le pilote le plus expérimenté, qui prendra le départ.
On brave les éléments pour asser jusqu'au "raccordement" pour aller voir passer la meute.
Même pour des "petites" funcup, voir un lâcher de 55voitures sous la pluie est très impressionnant.
40Minutes après, fin de relais, et c'est Julien qui prend la voiture. On débriefe avec Vincent pour savoir où ca glisse moins, mais l'état de la piste est "très difficile", et ses recommandations tourneront plutôt autour du fait de ne pas prendre de risques et de ne pas casser la voiture.
Vcoil prend le relais, et je m'équippe en attendant mon tour.
Sous la pluie, par mauvaise visibilité, nous tournons entre 2:08 et 2:10. Mais malgré cela, nous gagnons des places (surtout grâce à Julien, déchainé lors de ses relais).
Quand mon tour arrive, on est 47eme, et je pars le couteau entre les dents avec l'intention de ne pas gâcher les efforts de mes coéquipiers.
Ca glisse, ca rippe, mais on s'applique. On est incapable de tenir la moitié du plateau, mais en condition de course, je finis par trouver un rythme, et même à dépasser quelques concurrents.
Mes 40 minutes passent très vite, et je suis presque surpris par le panneau "342 - PIT".
Quand je sors de la voiture, on est 46eme!
J'ai repris un peu confiance, et je me suis détendu. Mes coéquipiers reprennent le volant, et on continue à grimper! 45, 43 puis 41eme grâce à la persévérance de Julien (qui a vraiment surpris les autres pilotes par ses chronos) et l'application des autres (qui tournent 2-4sec/tour moins vite que Julien).
On terminera la 1er manche 41eme. Ce sera la position de départ de la 2eme manche.
Mon tour arrive, et on repart à l'attaque. J'ai repris confiance et je m'applique. On voit que ma vitesse s'améliore, et je dépasse autant que je suis dépassé.
Il commence à y avoir de très belles bagarres, vraiment très amusantes.
La voiture glisse toujours autant, mais au lien de contrôler au volant le moindre écart, on la laisse couler en contrôlant avec les gaz (quelque chose dont je ne me serais jamais cru capable 24h plus tôt).
Je rentre toujours 41eme. Mais avec des temps de 2:06/tour.
Vcoil et Julien vont se livrer à de belles bagarres, malgré une piste changeante, avec des temps qui vont tomber : 2:04, puis 2:00, puis 1:58 pour Julien, soit le même temps que la 3eme voiture du team, actuellement en 6eme position!
Et enfin la pluie s'arrête. Vcoil signera 1:56 puis 1:53. Le scoreboard s'éclaire en vert car tout le monde améliore ses temps.
Dernier relais, c'est mon tour. La piste est sèche et je suis remonté à bloc.
Le "feeling" et la maitrise du drift acquise durant mes tours sur le mouillé vont me servir sur le sec.
Ca glisse encore, mais on passe beaucoup plus vite, dans un hurlement de pneus. On est pied au plancher, en drift, en 4eme dans la moitié du circuit, en bagarre avec tous les autres concurrents. On a finalement rejoint le niveau.
Les batailles sont dantesques, je suis un peu plus rapide dans les parties technique (notamment le freinage du bout de la ligne droite, où j'ai réussi à passer 4 voitures au freinage) mais je me fais distancer dans les parties "moteur" ce qui transforme le moindre dépassement en freinage désepéré pour aller placer la voiture en crabe dans la trajectoire d'accélération du concurrent dépassé.
Et même en sortant de Pouas (la grand parabolique) complètement en vrac, je n'arrivais pas à compenser le déficit de 10km/h des voitures que je tentais de dépasser.
J'ai attribué cela à un poids plus élevé (c'est p'tet le temps de penser à un régime) ou à un moteur qui "tire plus court".
C'est en discutant avec les autres pilotes après la course que nous comprendrons : Pratiquement toutes les voitures du championnat français disposent d'une boite séquentielle (contre notre boite 5 en "H") et de jantes en alliagne (vs nos jantes en tôle plus lourdes de 5kg/jante). On a en fait bataillé toute la journée avec des voitures plus rapide de 2sec/tour.
J'ai néamoins réussi à les tenir jusqu'au bout, en faisant l'aspi au teams de tête en passant des attardés à des moments propices.
On passe le drapeau à damiers, c'est terminé. On ramène la voiture sur la grille, qui sert de parc fermé.
J'y retrouve "R-Ickx-7", qui a mené la 149 jusqu'en 6eme position (après avoir été 4eme longtemps). "Ben dis-donc, j'ai vu que les derniers tours, t'avancais sacrément bien. J'arrivais presque plus à te passer". \O/
On rentre au stand à pieds. J'ai mal partout à force de se battre avec le volant (un des raisons pour laquelle je poste mon CR si tard).
On termine 36eme (+12 places!), à bord d'une voiture plus lente, sans expérience précédente de la course automobile, dans les pires conditions imaginables.
Dans mes derniers tours, sur un circuit quasi sec, j'ai signé un tour en 1:47 (le tour de plus rapide de la voiture).
Et surtout : on a pas cassé la voiture.
Très sérieusement, je recommande à quiconque est intéressé par les voitures de sport de faire ce genre de "test" en Funcup. C'est vraiment la formule idéale pour se faire une idée de ce qu'est une "vraie" voiture de course, et d'apprendre le que c'est que le pilotage.
Photos :
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